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10/07/2008

MALI - La "bouillante" vengeance de Mamou

Le drame s’est déroulé il y a plus de trois ans (en Décembre 2004), comme nous l’a confié une vieille dame, parente de la victime. Mais nous la relatons surtout pour souligner jusqu’à quel point cette remarque est fondée : l’amour et la jalousie sont aussi aveugles qu’inséparables ; c’est pourquoi ils “se tiennent toujours par la main”.

Mais lorsque la jalousie est exacerbée, mal contrôlée ou poussée dans ses derniers retranchements, elle est susceptible de générer des conséquences inattendues, souvent dramatiques. Et ce n’est certes pas Makoura qui dira le contraire, elle qui a “perdu la face” (au sens propre du terme), pour avoir oublié que cet autre adage n’est pas toujours fondé : “un tien vaut mieux que deux, tu l’auras“.

Le double foyer de Makoura

Cette jeune fille était mariée dans un bled situé à une trentaine de kilomètres de Kolokani. Elle paraîssait heureuse, surtout avec la venue de son premier mouflet (bébé). Mais l’apparence est trompeuse, dit-on. Et son mari en conviendrait sûrement, dont l’attitude envers le marmot ne pouvait prêter à confusion : elle laissait tout simplement planer le doute sur la paternité de ce dernier. Et pour cause...

Aussi bien avant qu’après le mariage de Makoura, ses relations (au sens propre comme au figuré) avec son “ancien amant” resté au village n’ont jamais été interrompues. Mieux... ou pire (c’est selon), les deux “ex-amants” étaient toujours mordus l’un de l’autre, encore plus qu’avant. Et ils mettaient la moindre occasion à profit pour “remettre le couvert”. Mais comment s’y prenaient-ils pour se rencontrer? C’est justement le mystère qu’ils étaient seuls à détenir, jusqu’au jour où de malheureuses circonstances finiront par l’élucider.

Depuis le mariage de Makoura, elle ne faisait jamais deux ou trois mois dans son foyer sans éprouver “la nostalgie” de sa famille et demander à son mari la permission d’aller “leur rendre visite“. Et jamais le pauvre “marri“ n’a soupçonné le motif réel des fréquentes visites de son épouse dans son village natal, bien que ledit village ne soit distant que d’une dizaine de kilomètres de celui où réside le mari.

Pourtant, aussi bizarre que cela puisse paraître, une petite voix intérieure chuchotait sans cesse à l’oreille du mari qu’il ...n’était pas le père biologique de l’enfant de sa femme. Aussi, en dépit de sa bonne volonté, il ne parvenait pas à aimer ce bébé, comme le ferait un vrai père. Comme il avait raison, car s’il savait...

Aussi nous revient-il à l’esprit cette pertinente remarque d’une personne qui n’est autre... qu’une femme : “Si la femme devait être répudiée ou divorcée à cause de l’origine biologique de ses enfants, le nombre des ménages se réduirait comme peau de chagrin”. Heureusement, pourrait-on renchérir ; et ce n’est pas Makoura qui dira le contraire.

L’occasion fait... la larronne

On dit que l’occasion fait le larron. Et les histoires de larrons engendrent toujours, au moins, un dindon de la farce et finissent par créer du bourdon (du bruit). Mais Makoura n’en a point conscience, qui décide un jour, comme d’habitude, de revoir sa famille. Et comme d’habitude, son mari y consent, sans soupçon le moins du monde (comme d’habitude) ce qui allait en découler.

En fait, Makoura voulait faire, de sa pierre, deux coups. d’un côté, présenter son tout premier mioche (enfant) à sa famille, comme c’est la coutume. De l’autre, -et surtout-, revoir son Roméo du village pour savourer ces instants de retrouvailles tant attendus, et apaiser cette “fièvre” qui, depuis longtemps, brûlait son corps.

Aussi, dès son arrivée au village natal, elle se met sur son ”trente et un”, en se sapant comme une jouvencelle de quinze ans. Et le soir venu, elle s’empresse de rendre visite à son “as de coeur“ qui l’accueille... à bras ouverts : c’est le cas de le dire. Et ils causent, et ils ressassent le bon vieux temps, et ils se tapent les mains, et les cuisses, et ...ailleurs.

C’est dans cette ambiance festive et cette position pour le moins “innocente” que Mamou les surprend. Mamou, c’est la dulcinée, sinon la promise de Bablén, puisqu’il faut enfin appeler notre Roméo par son nom. Mamou est une belle “jument“, mais très à cheval sur les principes de vertu et de fidélité, aussi maîtresse d’elle-même que de ses sens. Aussi comprend-elle tout de suite qu’entre son bablén et cette fille (Makoura), il y a... anguille sous roche. L’intuition féminine ? Toujours est-il qu’en fille futée et bien éduquée, Mamou ne laisse rien percer de sa rage.

Aussi, sans se douter de rien, bablén présente makoura à sa fiancée, Mamou : “C’est Makoura, la fille du deuxième frère de mon père ; celle dont je t’avais parlé. Elle est mariée, et elle vient passer quelques jours en famille“. C’était pourtant bien vrai que Makoura et Bablén étaient cousins. Le seul point qu’a sciemment omis Bablén (et pour cause), c’est qu’il y a belle lurette que lui et Makoura ont passé en pratique l’adage qui dit que “les cousins sont faits pour les cousines”.

Sans s’émouvoir outre mesure, Mamou se fend d’un llarge sourire à l’endroit de Makoura : “Sois la bienvenue, cousine. J’espère que tu ne vas pas nous quitter de sitôt. Eh, quel joli bébé tu as là ! Il est tout mignon ! Bon, vous allez m’excuser tous les deux, mais il faut que j’aille au marché, puisqu’il faut bien que je prépare quelque chose de spécial pour notre étrangère, n’est-ce pas, Bablén ? Makoura, je vous laisse. Encore, sois la bienvenue“.

Ah, hypocrisie féminine, quand tu nous tiens ! Une hypocrisie qui vient de prendre Makoura dans la nasse sans qu’elle ne s’en aperçoive. Aussi avait-elle même pris le soin de venir chez Bablén avec son bébé, non seulement pour abuser sa famille, mais surtout pour tromper la méfiance des voisins. Mais ce qu’elle ignorait, c’est que Mamou avait tout deviné, rien qu’en remarquant la ressemblance frappante entre Bablén et le bébé de Makoura. Autant dire que la berneuse était bernée à son insu? Et comme disent les bamanans, “le cadavre qui veut éviter celui qui doit le laver ira sale dans l’au-delà”...

Est prise qui croyait prendre

Mamou partie “au marché”, Makoura demande à Bablén, avec une pointe de jalousie dans la voix : “Qui est celle-là? Je devine que c’est ta copine?“. C’est, comme qui dirait, le monde à l’envers : le voleur, ou du moins, la voleuse qui est jalouse du bien volé de son propiétaire... Du coup, Bablén se sent gêné (il y a bien de quoi), mais il tient à persister dans son menson ge, car, de toute façon, Makoura n’est là que pour quelques jours. Et lui dire la vérité, c’est perdre ce à quoi il tient, malgré tout : ces quelques jours “enivrants” qu’ils doivent passer ensemble.

Alors, il se mit à rire... jaune, en lui mentant d’un ton hypocritement jovial : “Ne me dis pas que tu ne connais pas ma soeur ! Mais c’est elle qui est à Kolokani, aux mmains de ma tante, et cela, depuis sa tendre enfance ! “. Cette déroutante craque rassure pourtant Makoura, qui s’adoucit : “Excuse-moi ; je ne la connaissais pas, celle-là”. En effet, Makoura ne pouvait pas la connaître, puisqu’en réalité, Mamou vivait dans un autre village lointain. Ce jour-là, elle était venue voir son fiancé Bablén. Et le hasard, ou satan, a voulu que ce même jour, makoura vienne aussi chez Bablén.

Depuis longtemps, Mamou est promise à Bablén. Les colas sont distribuées, et dot versée depuis belle lurette. Il ne leur restait plus qu’à convoler en justes noces. Et Makoura, qui ignorait tout cela, est venue s’y mêler sans crier gare, pourrait-on dire, comme un cheveu dans la soupe. Et pour son malheur, mais un malheur indirectement provoqué par le cupide Bablén...

En fait, Mamou, par contre, n’ignorait rien des relations “secrètes” qui liaient son fiancé à sa “cousine” : depuis longtemps, elle savait tout, de A à Z., bien qu’elle habitât loin du village. Mais elle n’a joué à la dupe que pour mieux en avoir le coeur net. Et c’est pour mieux surprendre ces deux qui croyaient l’avoir cocufiée qu’elle a feint d’aller au marché. Mais “rira bien qui rira le dernier ! ”, fulminait-elle depuis longtemps.

Un “bouillant“ châtiment

De retour du “marché”, Mamou allume du feu, remplit une marmite d’eau et la pose sur le foyer. Elle revient ensuite s’asseoir près de Bablén et Makoura. Et tous trois se mettent à causer, comme des personnes qui se sont toujours connues et ne se sont jamais quittées. Au cours de la causerie, Mamou finit par comprendre, rien que par leur attitude, que son homme (Bablén) et sa cousine ont passé du bon temps en son absence. Pourtant, elle fait comme si de rien n’était, bien que son coeur soit submergée d’une rage folle. Mieux, elle se met même... à raconter des anecdotes, avec un ton aussi comique que serein . Mais ne dit-on pas que c’est le calme qui précède toujours la tempête?...

A un moment donné, Bablén se sent de trop, tellement ses deux “femmes” étaient devenues intimes. Aussi, il se retire pour prendre de l’air au dehors, laissant la fiancée et la cousine papoter à loisir et mieux faire connaissance. A propos de connaissance, Makoura en a eu sa dose, car Mamou racontait tant de blagues qu’elle la faisait rire aux larmes. La pauvre..

Soudain, Mamou se lève et dit, d’un ton affolé : “Tiens, à force de raconter des histoires, j’ai oublié mon repas. Et ma sauce qui risque de se gâter. Excuse-moi, Makoura, je vais dans la cuisine et je reviens tout de suite”. Elle sort, laissant Makoura, toujours aux prises avec sa crise de rires. Aussi, lorsque Bablén revient, elle lui dit, en essuyant ses larmes de rire : “Ah, Bablén, ta soeur est imbattable. Elle a failli me tuer de rires. Elle m’a séduite, et je suis noyée sous son charme. Il va falloir que...”.

Elle n’aura pas le temps de terminer sa phrase. Pendant qu’elle pérorait ainsi, Mamou surgit derrière elle, tenant, à l’aide d’un torchon, une marmite bouillante à plus de “mille” dégrés. Et, avec un rictus meurtrier aux coins des lèvres, elle balance froidement le contenu de la marmite sur Makoura, en criant de haine : “Prends ça, sale garce ! Je te lave aujourd’hui de tous tes péchés ! “.

Source: Maliweb (Mali)

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